A. Haldemann: Prekäre Eheschließungen

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Title
Prekäre Eheschliessungen. Eigensinnige Heiratsbegehren und Bevölkerungspolitik in Bern, 1742–1848
Other Titles
Konflikte und Kultur – Historische Perspektiven 39


Author(s)
Haldemann, Arno
Published
München 2021: UVK Verlag
Extent
429. S.
Price
open access
by
Lucienne Hubler

Thèse de doctorat soutenue à Berne sous la direction des professeurs Joachim Eibach et Margareth Lanzinger, l’ouvrage d’Arno Haldemann traite d’un sujet original. L’auteur a choisi de se pencher sur ce qu’il appelle les « mariages précaires », soit des unions projetées dont le futur incertain, réel ou subjectif, amène particuliers et institutions à les combattre. Sa recherche se déploie dans la longue durée, de 1742 à 1848, période de transition ou « Sattelzeit » selon le concept forgé par Reinhart Koselleck et utilisé dans l’historiographie de langue allemande. Il souhaite étudier si, à l’instar d’autres aspects sociaux, l’opposition aux mariages précaires a évolué et comment.

La première phase va de 1742, date d’un remaniement de la loi consistoriale, à l’invasion française en 1798, qui amène un changement du régime politique. Le Consistoire suprême, en ville de Berne, juge les appels qui proviennent aussi bien des couples à qui un consistoire local a dénié le droit de se marier que des opposants à leur union. Sous la République helvétique (1798 – 1803), le Consistoire suprême est remplacé par des tribunaux de district et le tribunal cantonal. Le droit de pétition accordé aux citoyens, largement utilisé pour nombre de problèmes, l’est aussi par les couples qui défendent leur droit au mariage. De 1803 à 1848, le système consistorial renaît et le Code civil bernois (1826) conserve certains aspects des anciennes lois.

Le nombre de cas examinés est faible et dépend dans une large mesure de l’obstination des parties, candidats au mariage comme opposants. L’auteur donne de nombreux exemples en citant les propos rapportés dans les sources, qui rendent vivante la situation.

Sous l’Ancien Régime, quelques types de mariages étaient particulièrement mal vus : les remariages, les unions financièrement mal assorties et celles impliquant un étranger, le terme s’appliquant à toute personne n’étant pas bourgeoise de la commune. Les mineurs (et la minorité civile dure jusqu’à 25 ans) ne pouvaient se marier sans l’assentiment du père ou du tuteur. Les familles étaient les premières à saisir le consistoire pour éviter un prétendant trop pauvre, une fille jugée de mauvaise vie ou des écarts d’âge trop importants. Il fallait aussi protéger l’héritage des enfants d’un premier mariage. Des 61 oppositions trouvées par l’auteur, 34 émanaient de la parenté des futurs époux.

Les familles n’étaient pas seules à réagir. Les communes, dont l’une des tâches était l’assistance à leurs ressortissants, n’avaient aucune envie d’accepter des unions dont il était prévisible que parents et enfants seraient bientôt à leur charge et c’était souvent elles qui s’opposaient à un projet matrimonial. Une partie de la population était ainsi empêchée de convoler à cause de sa pauvreté.

Les futurs défendaient avec énergie leur projet. Ils mettaient ainsi en avant qu’un couple pouvait s’en sortir mieux qu’un célibataire et que l’épouse contribuerait à augmenter le revenu disponible. Ceux qui avaient un enfant né ou à naître insistaient sur la solidité de leur attachement. Ils critiquaient aussi les lois consistoriales bernoises fort rigides sur les liens de parenté qui empêchaient nombre de mariages.

Sous la République helvétique, 160 pétitions, signées le plus souvent par l’homme, concernèrent des mariages précaires. Leur nombre, faible en 1798, culmina en 1801, puis redescendit. L’argumentation des futurs couples reposait sur le droit naturel pour chacun de convoler, parfois sur l’amour qu’ils se portaient, deux éléments sinon nouveaux, tout au moins plus visibles qu’auparavant. Ils critiquaient aussi la proclamation des bans à trois reprises, quelquefois dans plusieurs paroisses, qui leur coûtait du temps, de l’argent et favorisait les réactions violentes des communautés (charivaris). Les autorités centrales se montrèrent bien disposées envers les pétitionnaires et près de 90 % des demandes furent acceptées.

La période 1803 – 1848 vit la restauration de quelques éléments (par exemple droit d’entrée pour les conjoints étrangers, enfants illégitimes sans droit de succession), mais aussi des nouveautés, comme les mariages inter confessionnaux, facilités par les libertés d’établissement et du commerce. Les opposants aux mariages précaires furent surtout les communes, 59 sur 73 cas. Face au paupérisme croissant, craignant la surpopulation, elles cherchèrent au maximum à protéger leurs ressources. La situation financière du futur fut examinée soigneusement (payait il des impôts ou avait il été assisté et n’avait pas remboursé ?). Dans ce cas, le droit au mariage lui était refusé et la première moitié du XIX e siècle fut moins favorable aux pauvres que l’Ancien Régime.

La question des mariages précaires fait intervenir les futurs couples, les familles et les communes. Les opposants défendaient soit leur position sociale, soit leurs intérêts économiques. S’y mêla, dès le XVIII e siècle, le problème démographique. Voulait on, alors que l’on croyait (faussement) à la dépopulation, encourager la croissance et donc favoriser les mariages ? La Société économique de Berne discuta longuement cette question et fut partagée. Au XIX e , le débat porta plutôt sur la paupérisation. Dans tous les cas, l’étude des mariages précaires a bénéficié d’une nouvelle approche en utilisant la source des tribunaux d’appel.

Zitierweise:
Hubler, Lucienne: Rezension zu: Haldemann, Arno: Prekäre Eheschliessungen. Eigensinnige Heiratsbegehren und Bevölkerungspolitik in Bern, 1742 – 1848. München: UKV-Verlag 2021 (Konflikte und Kultur – Historische Perspektiven, Bd. 39. Zuerst erschienen in: Berner Zeitschrift für Geschichte, Jg. 83 Nr. 3, 2022, S. 51-53.

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Berner Zeitschrift für Geschichte, Jg. 83 Nr. 3, 2022, S. 51-53.

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